Chronique
16 décembre 2016
Etat des lieux qualité de l’air

Les particules fines traquées de toutes les manières

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La pollution particulaire imposante à Paris met en lumière l’impact sur la santé des fortes concentrations de poussières dans l’air. Mais le nuage polluant sensibilise aussi sur l’évolution des techniques qui permettent d’alerter populations et pouvoirs publics.

Alors que l’air chargé de particules a fait tousser un quart de la France la semaine dernière, l’enjeu de la mesure des polluants apparaît évident. Celle-ci concerne la santé des gens.

« Et cette mesure évolue, elle nous permet de traquer l’origine des pollutions. De plus en plus elle autorisera des décisions efficaces au cas par cas » avait souligné Xavier Villetard, directeur des Etudes, à Air PACA, le 2 décembre dernier à Aix-en-Provence. Devant un public de professionnels et d’associatifs, invité par le Cyprès, il pouvait « mesurer » le chemin parcouru. « Nous sommes loin des opacimètres utilisés dans les années 1970, qui recueillaient les poussières noires, et nous disaient ce que nous avions respiré » dans le passé.

Les particules fines, puisqu’il s’agit d’elles, sont en passe, actuellement, d’être mesurées et analysées, toutes les dix minutes, grâce à l’ACSM. Cet Aerosol Chemical Speciation Monitor, Air PACA en a acquis un, qui dira, en 2017, la composition chimique des poussières fines mesurées à Marseille. Un investissement de 200 000 € qui pourrait permettre, si les politiques publiques sont au rendez-vous, de réduire dans l’avenir la facture santé pour des milliers de personnes.

Traquer les particules hyper fines qui envahissent l’organisme devient possible

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Ce simple cercle,montré par Xavier Villetard,aimante les molécules chimiqueset permet leur analyse.

Avec cet appareil, qui caractérise les particules respirées par les Marseillais, « il deviendra possible, pensons-nous, d’identifier la source de fortes pollutions ponctuelles » estime Xavier Villetard.

Moins onéreux mais tout aussi utile, l’Aethalomètre AE33 mesure, lui, le carbone suie, ou black carbone, ces poussières extrêmement fines, de l’ordre du micron qui, une fois dans les poumons, peuvent traverser les tissus, voyager dans le système sanguin et générer des désordres dans l’ensemble de l’organisme humain, cerveau compris.

« Cet appareil nous dit ce qu’il en est de la part des combustions de fossiles, en distinguant celles qui proviennent du bois brûlé » précisait le directeur des Etudes d’Air PACA. « Il fait partie de l’arsenal qui nous a permis de mettre en évidence, à Nice l’hiver dernier, que ce carbone suie représentait près du quart de la pollution mesurée. Et, qu’à Marseille, cette proportion était à peine en retrait ».

Cet arsenal comprend aussi des granulomètres, mesurant l’infiniment petit, des particules d’un diamètre de 20 à 30 milliardièmes de mètre. Ils font appel à la lumière, en mesurant l’ombre des particules qui passent. Air PACA déploie ces appareils à Marseille, où la circulation automobile est dense et la pollution prégnante ; et à Port-de-Bouc, où les usines diffusent en masse des poussières fines.

« Les nouvelles technologies de mesures confortent l’idée qu’il faut lutter au quotidien contre la pollution de fond »

Or, en 2014-2015 ces deux appareils de mesure ont livré des résultats étonnants, pour les hommes de l’air… « Ils nous ont permis de savoir que, en dehors des épisodes de forte pollution, c’est à Marseille que les niveaux de fond étaient les plus importants. En revanche, en cas d’épisode de pollution importante, c’est la responsabilité des industries de Port-de-Bouc qui est mise en évidence ».

Mais ces appareils de mesure, aux technologies variées, s’ils permettent d’affiner la connaissance des polluants et de découvrir leur origine, incitent aussi l’Administration à modifier ses réponses.

« Nous savions bien l’importance de la pollution de fond, mais une fois qu’elle a été prouvée par la mesure, et bien les autorités ont cessé d’imposer des limitations ponctuelles de vitesse, pour préférer la limiter toute l’année » sur certains axes. La coercition, peut-être, mais à bon escient.

Une perspective qui a fait sûrement réfléchir les Parisiens, prisonniers qu’ils ont été d’un véritable dôme de particules, qui ne se dispersaient pas. Au contraire, ce couvercle retenait des pollutions tout à fait « habituelles ».